MADRID (AFP) — Le juge espagnol Baltasar Garzon a ouvert mercredi une enquête préliminaire visant notamment les auteurs présumés des tortures commises au camp de prisonniers américain de Guantanamo, dans le cadre d'un "plan systématique" de l'administration Bush.
L'enquête vise "les possibles auteurs matériels et complices" de ces tortures et les "concepteurs" du système carcéral de la base de Guantanamo, sur l'île de Cuba, selon un procès verbal du juge Garzon reçu par l'AFP.
Elle fait suite à une plainte déposée par quatre ex-détenus de Guantanamo, dont Hamed Abderraman Ahmed, surnommé "le taliban espagnol", ainsi qu'un Marocain vivant en Espagne, un Libyen et un Palestinien.
Elle se fonde sur la compétence universelle que se reconnaît depuis 2005 la justice espagnole pour enquêter sur les crimes contre l'humanité, génocides et tortures commis dans le monde entier.
Cette compétence ne s'applique toutefois que si les faits dénoncés ne font ou n'ont fait l'objet d'aucune enquête dans le pays où ils ont été commis.
Le juge Garzon écrit que les notes internes à l'ancienne administration Bush récemment publiées "semblent confirmer ce qui n'était avant qu'un soupçon: l'existence d'un plan autorisé et systématique de tortures" à Guantanamo.
Le magistrat, mondialement connu pour avoir fait arrêté l'ex-dictateur chilien Augusto Pinochet à Londres en 1998, souligne qu'il va solliciter des autorités américaines la transmission de ces documents.
« Ce plan systématique configure la possible existence d'une action concertée pour l'exécution d'une multitude de délits de tortures contre les personnes privées de liberté à Guantanamo et d'autres prisons dont celles de Bagram » (...) en Afghanistan, poursuit le juge Garzon.
Quelque 800 adolescents et adultes soupçonnés d'activités terroristes sont passés par les cellules de Guantanamo, dont seulement une vingtaine ont été inculpés. Environ 240 y sont toujours détenus.
Beaucoup ont affirmé avoir souffert de mauvais traitements et d'humiliations au camp de Guantanamo, qui sera fermé d'ici décembre en vertu d'un décret signé en janvier par le nouveau président américain Barack Obama.
Cette enquête est sans rapport avec une autre procédure pour tortures visant six ex-responsables de l'administration de l'ancien président américain Georges W. Bush ayant oeuvré à la conception juridique de Guantanamo, à laquelle le parquet espagnol s'est formellement opposé le 17 avril.
Le ministère public avait estimé que cette plainte n'était pas recevable car elle visait des personnes sans pouvoir de décision qui avaient simplement élaboré "des rapports juridiques non contraignants".
Ce dossier n'est toutefois par complètement enterré. Il a été transmis à la demande du parquet à un autre juge espagnol chargé d'enquêter sur les escales de vols de la CIA en Espagne, qui n'a pas encore pris de décision sur la poursuite de l'enquête ou son classement.
Le président Obama est réticent à l'ouverture d'une enquête sur Guantanamo. Il a néanmoins laissé ouverte la possibilité de poursuivre les rédacteurs des notes internes au gouvernement Bush ayant apporté un cadre juridique aux méthodes d'interrogatoires musclés, voire à la torture pratiquées dans ce camp.
Source: AFP
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