L'annonce de la fermeture de la prison de Guantanamo par l'administration Obama avait réjoui les organisations de gauche et de défense des droits de l'homme. La réouverture des tribunaux militaires d'exception chargés de juger les terroristes présumés qui s'y trouvent aura sans doute l'effet contraire. Le président américain a annoncé, vendredi 14 mai, une réforme de ces "commissions militaires" mises en place sous George W. Bush, qui seront rouvertes avec plus de garanties légales pour les détenus.
Le nouveau cadre légal prévu par l'administration démocrate, avec approbation du Congrès, devrait prévoir des restrictions sur l'usage des témoignages indirects, c'est-à-dire non confirmés à la barre par celui qui les a produits, et les confessions obtenues sous la contrainte de techniques d'interrogatoire controversées comme la simulation de noyade ("waterboarding"). Les détenus disposeraient également de davantage de liberté pour choisir leur avocat militaire.
Ce changement du système judiciaire de Guantanamo ne devrait pourtant affecter qu'un très faible nombre de détenus. Il ne reste que 241 détenus dans la prison militaire américaine, dont 60 jugés libérables. La réforme ne devrait concerner tout au plus qu'une vingtaine de détenus, croit savoir la presse américaine, dont cinq individus soupconnés d'avoir participé aux attentats du 11-Septembre. Actuellement, le système des tribunaux d'exception est suspendu depuis le 20 janvier et le gouvernement américain devrait demander un délai de suspension supplémentaire de 4 mois afin de donner le temps au Congrès de se prononcer.
En sept ans, les tribunaux d'exception n'ont examiné que trois cas, contre 145 pour les tribunaux fédéraux. Dans le même temps, près de 800 hommes et adolescents ont été détenus à Guantanamo. La prison militaire doit fermer ses portes d'ici janvier 2010, et l'administration Obama pourrait manquer de temps pour examiner tous les dossiers. Le Wall Street Journal annonce que le transfert de certains détenus sur le sol américain est envisagé. Ceux qui ne seront pas poursuivis seront relâchés ou transferés vers d'autres pays. Vendredi, l'Algérien Lakhdar Boumediene a été transféré vers la France.
"RÉGIME ILLÉGAL DE DÉTENTION"
La décision de Barack Obama n'a pas manqué de faire réagir les associations de défense de droits de l'homme outre-atlantique. "Relancer les tribunaux militaires vide de son sens la fermeture de Guantanamo", a souligné Human Rights Watch, alors qu'Amnesty International a rappelé que "les commissions militaires faisaient partie d'un régime illégal de détention et étaient destinées à faciliter les condamnations".
Pour l'American Civil Liberties Union (ACLU), principale association de défense des droits civiques, il est "dommage qu'Obama tente de relancer une politique vouée à l'échec". "Même avec les modifications annoncées, les commissions ne seront pas légitimes", rappelle Jonathan Hafetz de l'ACLU. C'est la continuation de la politique de détention de l'administration Bush". Selon ses conseillers, M. Obama, qui s'était élevé pendant la campagne contre "les commissions militaires illégitimes" de son prédecesseur, a tranché pour une modification car il était trop difficile de juger tous les détenus dans des tribunaux civils.
Source: Le Monde
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire