mercredi 6 juin 2007

Une fillette canadienne risque la mutilation génitale

À moins d'un revirement, une jeune mère sera expulsée dans son pays d'origine avec sa fille de deux ans fortement menacée d'excision, puisque la Guinée est le pays où le taux de mutilation génitale est le plus élevé au monde.

Les éléments de preuve à l’appui de la conviction de madame Touré à l’effet que sa fille sera soumise à cette cruelle pratique de mutilation génitale sont solides. Selon des sources d’information des plus crédibles, y compris le Département d’État aux États-Unis, l’UNICEF et des sources publiques guinéennes, le taux de mutilation génitale féminine en Guinée-Conakry se situe entre 96 et 98 pourcent.

La jeune mère de famille a épuisé presque tous ses recours. Plusieurs groupes, dont l’Église unie du Canada, Amnistie internationale et la Fédération des femmes du Québec lui prêtent main-forte. Ils demandent à la ministre de l’Immigration, Diane Finley, de se servir de son pouvoir discrétionnaire pour lui accorder un sursis, le temps qu’une nouvelle demande ne soit étudiée. Son expulsion est prévue pour le début du mois de juillet.

L'histoire de cette jeune femme remonte à 2003, à l'époque âgée de 19 ans et sans enfant, Oumon Touré fuyait un mariage forcé en Guinée où elle a été excisée par sa belle-mère.

Oumou Touré est entrée au pays grâce à des papiers illégaux en novembre 2003. Cependant, comme le note Me Goldman «Il n'y a rien d'exceptionnel là-dedans, c'est la seule façon d'obtenir un visa». Sa demande pour obtenir le statut de réfugié a été refusée en décembre 2004. Elle a accouché de Fanta deux semaines plus tard. Pour éviter l’expulsion, elle a demandé un examen des risques avant renvoi. Autre échec. « La cliente n’a pas réussi à prouver de façon convaincante sa situation personnelle de persécution, soit l’existence de son mari et de sa belle-mère », explique le porte-parole d’Immigration Canada, Stéphane Malépart.


«En 2006, une famille africaine qui vivait en Alberta a obtenu la résidence permanente pour des raisons humanitaires dans les mêmes circonstances», rappelle Claudette Cardinal, coordonnatrice du réseau de réfugié pour Amnistie Internationale.

Troisième tentative : demande de résidence permanente pour motifs humanitaires. Aussi refusée. Elle a ensuite porté sa cause devant la cour fédérale. La cour a statué que les intérêts de l’enfant avaient été pris en compte. Cela fait bondir le Bureau international des droits des enfants qui appuie la cause de Mme Touré. « L’excision est une grave atteinte à la dignité humaine », dit sa porte-parole, Catherine Gauvreau.

Le nouvel avocat de Mme Touré, Me Rick Goldman, explique ces multiples refus par le court dossier préparé par son prédécesseur, avocat de l’Aide juridique.

«Quand tu es payé 150 $ pour un dossier qui devrait prendre entre 30 et 40 heures à monter, on ne peut le blâmer », a-t-il dit. Me Goldman s’est chargé de faire une seconde demande pour des motifs humanitaires. Hier matin, il disait craindre que
Mme Touré ne soit expulsée avant que la demande ne soit traitée. En après-midi, il a reçu une bonne nouvelle. Une rencontre avec Immigration Canada aura lieu cette semaine. « On traite ce genre de situation-là avec beaucoup de compassion et le plus rapidement possible », dit M. Malépart, d’Immigration Canada.

Le père des deux enfants nés au Canada n’est pas dans le décor. Sa famille, c’est sa colocataire dans leur appartement du quartier Parc-Extension à Montréal, aussi originaire de la Guinée-Conakry. Et sa psychologue, Sylvie Laurion. « Ce qui m’a frappée, c’est sa peur, proche de la terreur », raconte-t-elle.

En Guinée-Conakry, la mère d’Oumou a tout fait pour empêcher qu’on lui coupe le clitoris. Mais à sa mort – Oumou avait 19 ans –, la jeune femme n’avait plus personne pour la protéger. La première femme de son père polygame s’est empressée de l’exciser. Puis, elle a organisé un mariage forcé. « Les conditions de servitude qu’elle a vécues après la mort précoce de sa mère l’ont rendue très vulnérable », indique la psychologue.

Bloquistes et libéraux plaident en faveur d'une famille menacée d'expulsion

Touchés par la situation d'une jeune mère de famille établie à Montréal mais menacée d'expulsion vers son pays d'origine, la Guinée-Conakry, le député libéral Denis Coderre et la bloquiste Meili Faille exhortent le ministère fédéral de l'Immigration à faire preuve d'humanisme et de surseoir au renvoi.

M. Coderre, lui-même un ancien ministre de l'Immigration, admet que chaque cas est spécifique, mais il estime que la situation de Mme Touré mérite qu'on agisse. Lorsqu'il était responsable du portefeuille de l'immigration, M. Coderre dit être intervenu pour des raisons humanitaires.

Mme Touré, qui est aussi mère d'un garçon de neuf mois, pourrait être déportée au début de juillet. Comme ses enfants sont nés au Canada, elle pourrait décider de laisser ses enfants derrière elle pour éviter que sa fille subisse ce qu'elle aussi a subi, une mutilation génitale.

Mais pour la bloquiste Meili Faille, c'est un choix inhumain qu'on imposerait alors à la mère. "On ne peut pas demander à une mère de faire ce choix-là", souligne Mme Faille.

"Les faits sont accablants. Il s'agit des droits d'une fillette née au Canada", poursuit la députée de Vaudreuil-Soulanges.
Interrogé aux Communes par le Bloc, Ed Komarnicki, le secrétaire parlementaire de la ministre, a rappelé qu'il n'était pas approprié de commenter publiquement un cas spécifique et qu'il y avait une procédure en place pour des cas de ce genre.
Denis Coderre a fait valoir que c'est le sort que risque de subir l'enfant qui devrait guider le gouvernement dans ses décisions.

"Quand on regarde ce dossier-là, il n'y a pas que la question de la mère. Il faut aussi penser à l'enfant et l'environnement qui s'y rattache", a déclaré M. Coderre, avant la réunion hebdomadaire du caucus libéral. Pour la santé, le bien-être et la vie de Fanta, il est essentiel qu'il y ait une intervention, a-t-il ajouté.

Mardi, lors d'une conférence de presse, des défenseurs des droits de la personne ont lancé un appel à la ministre de l'Immigration, Diane Finley, pour qu'elle arrête la procédure d'expulsion.

Ils ont souligné que la mutilation génitale qui menace la petite fille devrait être suffisante pour convaincre les autorités.

Source: Branchez-vous , Canoe, Cyberpresse

Mise à jour le 9 juin 2007

Immigration Canada a accepté la demande de Mme Touré de demeurer au Canada pour des raisons humanitaires et la confirmation de l'autorisation de rester au pays a été envoyée à l'avocat de Mme Touré.

3 commentaires:

Unknown a dit…

On devrait pouvoir laisser vivre cette jeune dame ici, au Canada. Ce sera injuste de l'expulser. C'est pas une criminelle que je saches. J'estime qu'il y a une dose de démagogie dans le travail de l'immigration Canada. Elle n'a voulu rencontrer Madame Touré pour étudier les nouveaux éléments de preuve que quand il y a eu une conférence de presse; c'est-à-dire rendu public. C'est inhumain et démagogique

Unknown a dit…

On devrait pouvoir laisser vivre cette jeune dame ici, au Canada. Ce sera injuste de l'expulser. C'est pas une criminelle que je saches. J'estime qu'il y a une dose de démagogie dans le travail de l'immigration Canada. Elle n'a voulu rencontrer Madame Touré pour étudier les nouveaux éléments de preuve que quand il y a eu une conférence de presse; c'est-à-dire rendu public. C'est inhumain et démagogique

Folly a dit…

Est-ce que l'état gère par l'entremise des médias? Si cette histoire n'aurait pas été publique, je craint qu'elles auraient été envoyées.